mercredi 31 décembre 2014

"La vie comme je l'aime" - Marcia Pilote

Je suis tombée par hasard sur un de ses livres de chroniques en lisant une pub d’Archambault. Je ne connaissais pas Marcia Pilote. Animatrice d’émissions qui passent surtout le jour, moment auquel je suis au travail. Après avoir lu quatre livres en un peu plus d’un mois, parcouru tous les extraits vidéos sur Youtube dans lesquels Marcia apparaît, car oui je la prénomme car j’ai déjà l’impression qu’elle est devenue mon amie, car je suis charmée. J’aime son authenticité, son altruisme. Elle s’adresse à ses lectrices avec un désir réel d'aider. C’est vrai qu’il y a des chroniques que j’ai lues en diago, car pas tous les sujets me rejoignent, mais plusieurs m’interpellent, me font réfléchir, me font m’asseoir et prendre le clavier avec un état d’esprit prompte à bouger. J’ai adopté le cahier de gratitude. Depuis plus d’un mois, j’ai mon cahier de « Merci Seigneur » à côté de mon lit. J’y griffonne les bénédictions de ma journée. Je me remémore les accords de Toltèque. Je me regarde aller et j’identifie mes « syndromes », tel que le « syndrome-de-celle-qui-se-sent-coupable », le « syndrome-de-celle-qui-se-sent-responsable-du-bonheur-de-tous ». Bref, c’est oui de la psycho-pop, mais il y a des moments dans la vie que ces outils simples arrivent à point, parce que la vie parfois c’est compliquée… Merci chère amie! 

dimanche 5 octobre 2014

Le liseur du 6h27 - Jean-Paul Didierlaurent

Il monte les marches de son train de 6h27, descend le siège, toujours le même strapontin, sort un feuillet puis débute sa lecture à voix haute. Les utilisateurs du train habitués apprécient la routine. Guylain Vignolles, opérateur d’une « Chose » qui broie les livres invendus et les vomit en pâte attrape parfois de façon incognito, si on le savait il se ferait mettre à la porte, quelques pages… et il fait revivre l’espace d’un trajet l’âme d’un écrivain dont les mots se feront engloutir.

Dans cette usine macabre, Guylain côtoie l’alexandrophile qui ne parle qu’en vers, puis les êtres qui jouissent de la destruction. Le bon et le méchant…

Mais le papier qui disparaît avec ses mots alors que Guylain tombe sur cette clé USB dont les mots apparaissent sur une quantité de feuillets qu’il n’a pas à dissimuler. …C’est une dame-pipi, une aide-laborantine, une collectionneuse de faïences, une écrivaine… Guylain est sous le charme… nous aussi, lecteurs, nous le sommes complètement!!

C’est écrit comme une nouvelle. Les feuillets sont des nouvelles à l’intérieur de la nouvelle. C’est des éclats de rire, de la vérité superbement écrit, je me suis vraiment amusée à lire « Le liseur du 6h27 ». Je lui donne 5/5.



mardi 24 juin 2014

L'Orangeraie - Larry Tremblay

L’Orangeraie de Larry Tremblay, tout petit roman mais chargée comme la ceinture que portera Azziz, enfant de 9 ans, transformé en kamikaze. La haine d’un père, qui a perdu son fils dans une de ces guerres du Moyen-Orient, transférée à celui des jumeaux Azziz et Amed dont les jeux sont au départ ceux d’enfants… sous le soleil où murissent des oranges. Comment la haine peut-elle devenir plus forte que l’amour porté à son fils? Comment la fierté tirée du sacrifice d’un fils peut s’avérer un baume…au point de faire la fête?


Car la conséquence, c’est aussi le chagrin de la perte d’un frère, Azziz atteint d’un cancer incurable. Azziz prend la place de Amed qui ne veut pas mourir. L’amour de la mère qui fait le dur choix de l’un de ses deux enfants. Mais Amed ne s’en tirera pas indemne; il entendra désormais les voix des enfants morts sous la bombe que portait Azziz, à qui on avait menti en lui disant qu’il ne mourrait pas en vain, mais bien pour anéantir un groupe de « chiens » ennemis. Amed prend l’identité de son frère au départ pour tromper, mais il mettra la vérité devant les yeux de son père qui le reniera, car la fierté est plus grande que l’amour pour les siens. C’est en Amérique que Amed devra continuer sa vie. Il voudra faire parler les voix qui scandent les bruits de l’enfance et de la guerre dans sa tête; il le fera par le théâtre pour ne pas devenir fou… Percutant. La guerre, la haine, beaucoup plus fort que l’amour. Roman qui ébranle. Admirablement écrit. Je donne un 5/5. 

lundi 19 mai 2014

Le cas Eduard Einstein - Laurent Seksik

Albert Einstein est fascinant. Je colle ses citations sur mon mur Facebook, car son intelligence inspire. Toutefois, je n’avais pas idée qu’il avait deux fils, dont un, Eduard, schizophrène. La première crise vers 18-19 ans. Avant, il était près de son père, vif, intelligent. Il avait fait sa première année de médecine. Il s’intéressait à la psychanalyse – c’était l’époque. On attribue la prédisposition à la maladie mentale à sa mère dont la sœur avait également été internée. Albert Einstein le mentionnera d'ailleurs... comme pour se dissocier de cette maladie? Eduard sera interné dès l’âge de 23 ans, au début des années 30, et ce jusqu’à sa mort. Électrochocs avec l’intensité de l’époque aussi. 

Pendant ce temps, Albert quittera la Suisse pour les É-U au début de la première guerre mondiale, car Juif sa vie est menacée; il ne reverra pas son fils. Il tentera d’occulter la vie de son fils de la sienne, car cette équation est insoluble pour lui. Mécanisme de défense? Oui j'essaie de défendre Albert Einstein... Ce scientifique est pour moi un grand homme somme toute. 

Porter le nom d’Einstein est lourd sur les épaules d’Eduard, également sur son frère et sur l’ex-femme Mileva, serbe et chrétienne. Ils se sont rencontrés pendant les études. Il la trouvait intelligente. Elle est tombée enceinte, mais ce bébé fille mourra et ce sera un secret bien gardé. Un bébé avant mariage... il ne faut pas faire ombrage. Mileva en gardera la peine au coeur. Tristesse qui fera partie des sentiments qui l'habiteront pour le reste de sa vie. Car jalouse, Mileva ne sera pas la compagne rêvée. La jalousie est toutefois un résultat, on s'en doute, d'un manque d’amour d’Albert qui, d’ailleurs aurait du mal à aimer même s’il se remariera plus tard. Albert quittera Mileva et ses deux garçons sans se retourner. Mileva demeurera une femme malheureuse. On l’imagine allant boitant – elle avait un problème de hanche – visiter son fils à l’asile et parfois se faire maltraiter, car souvent Eduard aura des excès de colère qu’il dirigera vers des hallucinations incarnées par sa mère. Eduard n'est pas une mauvaise personne, il est juste habité par mille images qui le dirigent. 

L'autre fils, ingénieur, ira lui aussi s’installer aux E-U mais ce n’est pas intentionnellement pour voir son père. Les rapports resteront toujours relativement froids. La religion les sépare autant que la distance physique qui a eu lieu pendant ces années.

Le cas d’Eduard détrône-t-il Albert Einstein? On se l’imagine toujours avec sa tête un peu folle, remplie d’idées et combien d’intelligence. Mais en même temps, on sait qu’Einstein était un marginal et que sous l’intelligence se cache comme souvent chez ces cerveaux un peu de folie aussi. Et intelligence mathématique ne veut pas dire qu’il y ait intelligence émotionnelle. Le grand personnage ne pouvait pas contrôler les paramètres de la condition de son fils et on le sent désemparé, jamais l'auteur veut nous faire sentir qu'il manquait de coeur. Il veut préserver les souvenirs. On sent le désarroi, la tristesse d'Albert Einstein.

Eduard parle directement, à la première personne, mais Mileva et Albert sont regardés et analysés à travers un narrateur omniscient. Les chapitres sont découpés en lieux, dont l'asile est le lieu principal. On voyage de la Suisse, à la Serbie et aux E-U. Le roman s'ouvre et se termine sur la lourde porte de Burgholzli qui se referme. Eduard ne semble pas malheureux, il est là... parce qu'il doit être là. Il ne sait plus ressentir de toute façon. Son père est mort d'une rupture d'anévrisme, sa mère un peu avant d'un AVC et il comprend qu'elle ne viendra plus le rassurer par sa présence, mais mécaniquement les journées se coulent. On l'a fait jardinier et c'est comme ça. 


J’ai appris. Quand j’apprends… j’aime! 

vendredi 18 avril 2014

"Le Chardonneret" - Donna Tartt

Terminé de lire : Le Chardonneret de Donna Tart. J’ai adoré cette histoire qu’un attentat à la bombe fera mourir la maman du protagoniste, qui a alors 13 ans, et modulera toute sa vie. Le tableau qu’un mourant lui dit d’aller chercher parmi les décombres sera son ancrage pendant toute sa vie. Perclus d’un sentiment de culpabilité, il avait forcé sa mère à se rendre à un rendez-vous à l’école et dont l'arrêt au musée, entre temps, a été fatal. Amoureux de ce tableau dont il sait qu’il doit le cacher, représente la vie qu’il a perdue. Car l’art ne meurt pas contrairement aux êtres faits de chair. Le Chardonneret », de Carel Fabritius, huile sur panneau (1654).

L’art fait partie de ce roman. Son protégé lui fera connaître la beauté des meubles anciens qui ont une vie en soi. Mais Théo aura du mal à vivre tout simplement. L’attachement quand on sait qu’on peut le perdre fait mal. Quelques longueurs dans ce roman de plus de 800 pages sur les vapeurs de la drogue, mais somme toute j’ai adoré ce voyage du tableau de New-York à Vegas et retour à son pays d’origine en Hollande. 

vendredi 24 janvier 2014

"Un paradis trompeur" Henning Mankell

J’ai aimé pour le contexte, l’histoire. Ça se passe au début du 20e si. Hanna quitte la Suède après avoir été invitée par sa maman veuve de quitter le bercail familial car, pauvre, la famille voit la possibilité de voir une bouche de moins à nourrir. Hanna va s’embarquer sur un navire de transport qui se dirige vers l’Australie à titre de cuisinière et y rencontrera son mari qui le sera que quelques semaines. Ce dernier mourra d’une maladie contractée lors d’une escale. Ne pouvant tolérer de rester sur le navire qui a fait mourir son amour, Hanna quittera en cachette le bateau lors d’un arrêt en Afrique, à Lourenço Marques (ancien nom pour Maputo, capitale du Mozambique). Malade, elle prend une chambre dans ce qu’elle croyait être un hôtel, mais qui est plutôt un bordel. Elle s’y fait soigner par les femmes noires. Le tenancier, un blanc, la demandera en mariage, ce à quoi elle acquiescera, y voyant comme une solution à son veuvage et au vide de sa vie. Or lui aussi mourra peu de temps après et elle se retrouvera la veuve richissime et propriétaire du bordel.
C’est la transformation de Hanna en Anna à Ana qui découvrira le rapport entre les Noirs et la suprématie blanche, colonisateurs portugais. On voit le regard de Ana s’habituer au rapport, s'affranchir de son rôle de femme soumise, puis à réaliser par la suite les inégalités devenant insupportables à ses yeux.  Elle sera témoin d’un meurtre de l’éleveur riche de chiens blancs par sa femme noire qui réalise que son mari avait une double vie avec une épouse portugaise. Pour Ana, cet homme méritait son sort. Elle va tout faire pour défendre cette femme emprisonnée pour le meurtre… mais en vain, car on la tuera. Ana tombera en amour avec le frère de cette femme…

Les images dont on tire de cette écriture sont belles; on ressent la chaleur, l’humidité, on voit la mer, les bateaux au port. On imagine les prostituées du bordel avec leur plumes et tenues grandiloquentes, les hommes avides peu ragoutants qui les visitent. On entend le piano se faire accorder jour après jour. On regarde le singe qui se balance aux lustres. …Mais on ne ressent pas les émotions. Henning Mankel est un homme et je n’ai pas l’impression qu’il comprend l’émotion d’une femme, je ne crois pas aux histoires d’amour de Ana… Donc oui pour l’ambiance, les images… mais ça demeure superficiel au plan émotif.