Le titre
relève d’un billet que Daragane, le protagoniste écrivain, avait sur lui, petit, lorsqu’il se déplaçait seul dans le quartier. C’est Annie Arstand qui a avait
inscrit l’adresse et ce mot sur le billet : Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier. Annie était… une
amie de sa mère? Les deux femmes se connaissaient par personne interposée, ça
certain. Ils partageaient des activités obscures? Annie était danseuse
acrobatique… mais quoi encore? Rien n’est dit textuellement. Mais elle a été
importante dans la vie de Daragane. On la perçoit comme celle qui a remplacé la
mère absente. Mais elle l’abandonnera aussi, mais contre son gré, elle voulait
l’emmener avec lui.
Ce roman
est une réminiscence d’un auteur sur une période de son enfance dont il n’est
pas certain qu’il voulait tant que ça déterrer; le tout se fait à son corps
défendant avec ces liens qui surgissent, un peu comme lorsqu’on tombe sur une
image, une odeur qui nous rappelle une étincelle d’enfance. Trop d’ombre perdure…
Daragane est un personnage obscur; il nous apparaît lugubre, renfermé, seul.
Le
minimum est dit, juste les souvenirs dont Daragane semblent privilégier. En
fait, il y a un mystère, plusieurs interrogations et… il ne faut pas s’attendre
à un punch à la fin. Beaucoup de questions resteront en suspens.
Tout
débute par un carnet d’adresses appartenant à Daragane retrouvé par un inconnu.
Dans ce vieux carnet, un nom : Torstel. Il serait impliqué dans un fait
divers, un meurtre perpétré il y a très longtemps sur une Colette. La curiosité
de cet inconnu pour le nom dans ce carnet, car il y voit une histoire qu’il
pourrait développer dans un roman. Il contact alors Daragane pour lui remettre le carnet en
échange d’informations.
La
mémoire est un personnage dans ce roman. Elle est inexistante au départ, puis
elle remonte le courant par bribes. L’inconnu et sa conjointe Chantal sont des
personnages secondaires; ils sont prétextes à placer les indices à éveiller la
mémoire de Daragane. Une fois passés, Daragane est dans le fil de sa tête à
travers le temps et on n’en parle plus. Cet inconnu qui veut chercher des
indices est un peu écrivain, juste un peu car il semble être aux prémisses d’écriture
puisqu’il prétexte avoir déjà écrit un livre dont l’auteur ne serait qu’un
homonyme. Mais il recrée le comportement de Daragane bien des années plus tôt
lorsqu’il cogne chez le voisin-médecin de Annie Arstand pour tenter de comprendre
ce qui c’est passé le jour où il s’est réveillé seul un matin alors qu’il se
préparait à passer la frontière pour l’Italie avec un faux-passeport. Annie qui
faisait office de maman a disparu. Il interroge le médecin sous de faux
prétextes pour comprendre. Le médecin lui répondra que la meilleure personne
pour répondre à ses interrogations serait peut-être ce petit garçon qui y
habitait. Un peu comme cet inconnu qui retrouve le petit garçon du photomaton
dans le dossier policier pour l’interroger. Car Annie Arstand a fait de la
prison, mais on ne saura pas pourquoi. Lorsqu’il la reverra un jour, la mémoire
de Annie (devenue Agnès Vincent) lui fait tellement défaut qu’il ne la
questionnera pas. On ne sait rien des parents de Daragane, ils sont évoqués
sans plus.
La mémoire enfouie se révèle… secoue
les puces de Daragane qui s’enfonçait dans sa solitude, mais on aimerait la
suite. À moins qu’il ne veuille garder sa vie à l’ombre comme la citation en
exergue : « Je ne puis pas
donner la réalité des faits, je n’en puis présenter que l’ombre. »
Stendhal
Mon appréciation :
perplexe. J’ai aimé l’écriture. J’aime les questions que le roman soulève sur
nos propres souvenirs qu’on enfouit parfois involontairement.