samedi 28 février 2015

"Le vent dans le dos" - Natalie Jean

Un coup de coeur!



Un recueil de nouvelles dont chacune ne se termine pas en l’habituelle chute mais plutôt en une envolée vers le ciel. « Le vent dans le dos », certes! Comme lorsqu’on court ou pédale avec l’impression de voler. Habituée aux nouvelles qui font mal lorsque tombe le point final, anticipation jusqu’au dernier paragraphe, car je ne suis tellement pas habituée de me retrouver le sourire aux lèvres après chacune de ces nouvelles qui insuffle du bonheur… Ça fait… du bien!!

Écrit d’une plume étonnante qui dessine plus que n’écrit, car les images suscitées sont là devant nos yeux tellement le décor où se meuvent ces personnages est bien décrit. Le français québécois est écrit joliment avec « djobe », « timhortonne » et fait sourire. Il y a des perles sur le thème du temps qui passe : « […] J’avais l’âge où l’on croit que la vie n’est qu’un brouillon qu’on pourra recommencer. Les heures, les années étaient longues… » (p. 34). «  […] je ne t’aime plus depuis si longtemps.. […] Mais connaît-on jamais la longueur exacte des secondes des autres? ». Ce qui m’a fait sourire : J’ai maintenant un vocabulaire plus esthétique des partitions qui séparent les bureaux… Des cloisons en tricot synthétique qui délimite les hypersensibles aux frontières (dans « Satisfaction »).


Les différents personnages, dont je situe l’âge d’après moi fin trentaine, début quarantaine pour la plupart, ont cette soif de tranquillité, de silence, de solitude et d’amour seulement si cet amour respecte ce terrain de jeu. On quitte, on se fait quitter, on est en couple, mais le ou les protagonistes y gagnent toujours. On est heureux dans ces nouvelles! Ça change du discours morose omniprésent!!

Ce matin, j’ai lu, j’ai profité de la vie, « j’ai regardé la lumière »… ça ressemble au bonheur de l’auteur si elle transpose ici dans ce recueil sa propre définition du bonheur. C’est le miens aussi, « je n’ai pas le paradis compliqué » comme elle le dit si bien… donc j’ai goûté au bonheur si bien que ça me donne juste le goût d’aller courir …Le vent dans le dos! 

5/5 



jeudi 19 février 2015

Azami - Aki Shimazaki

Difficulté à mémoriser le nom de cet auteur que je viens de découvrir. Aki Shimazaki. Le titre aussi : Azami. Azami, c’est une fleur de chardon. La grand-mère du protagoniste récitait un poème où on retrouvait cette fleur.

Mitsuo travaille au sein d’un magazine, dans la trentaine, papa et marié à une femme avec qui il vit une vie platonique – il dit « sexless ». Il se soulage dans des maisons closes – je ne me souviens plus du terme utilisé par l’auteur – j’ai remis le livre à la biblio. Il va rencontrer un camarade de classe qui l’amènera à rencontrer son amour inavoué de jeunesse : Mitsuko (oui je sais, c’est mélangeant). Mais son nom de serveuse est Azami. S’ensuivra une aventure. Mitsuo sollicite ses sens pendant que sa femme est en campagne à mettre en branle un projet agriculture.

Un roman tout en retenu. C’est écrit comme une nouvelle. Court. Un épisode qui fait ressentir ce qui vit encore au plus profond de soi, réfléchir sur sa vie, puis rebondir. Un carrefour où on décide de négocier un virage, tout en regardant dans le rétroviseur et en ne perdant pas de vue ce qui se passe devant. Mitsuo prend la route doucement, puis… décide de garder le droit chemin. C’est propre, simple, avec économie de mots et d’image, mais efficace et superbement écrit.

Mot de l'auteur: http://www.lapresse.ca/arts/livres/201511/13/01-4920544-aki-shimazaki-la-methode-shimazaki.php



dimanche 8 février 2015

L'attrape-coeurs - J.D. Salinger

Un attrape-cœurs, c’est ce que Holden Caulfield veut faire plus tard, pas chirurgien ou violoncelliste, car il ne pourrait pas. Sa main est demeurée avec des séquelles à la suite d’un défoulement nécessaire en fracassant les vitres du garage. Il veut éviter que les « mômes » jouant dans le champ de seigle tombent en bas de la falaise, soit dans le monde des adultes, la vie sans rêve. Il veut attraper ces petits cœurs. Le siens, il est déjà au fond de la falaise. On n’a pas su l’attraper. Il est tombé quand son frère Allie est mort de la leucémie trois ans plus tôt. Allie, c’était son frère rouquin, plus intelligent, plus drôle, qui écrivait des poèmes sur son gant de baseball pour pouvoir les lire quand il était en attente sur le jeu. Il était à peine plus jeune que lui. C’était son frère, son complice.

Le roman reconstitue les quelques jours précédant l’internement de Caufield âgé de 17 ans, pour une psychanalyse, les trois jours où il a erré dans New-York juste avant Noël après s’être fait mettre dehors de son école, Percey, collège réputé. Ses parents vont le « tuer » quand ils vont savoir, comme dit sa petite sœur Phoebe qu’il adore. Holden a erré dans la ville, en plein hiver, le froid, sa casquette avec oreilles, les signes d’un rhume… s’est arrêté dans des hôtels sordides, dans des bars pas très recommandables… Mais à l’école aussi, il errait. Holden qui porte la cravate, qui est poli en tout temps, qui a de l’écoute, une grande sensibilité pour l’autre, est aussi un presto rempli de colère.

Écrit en 1951, ce roman est écrit de façon très contemporaine. C’est probablement pour cette raison et pour les thèmes peu courants pour cette époque qu’il a tellement choqué. C’est le désarroi de l’adolescent, le futur flou, les valeurs chrétiennes présentes, mais loin d’être ancrées et actualisées, puis des objectifs de fuite plutôt que de projets, une vie qui manque de sens. Le propre de l’adolescence, mais qui existait peu dans les années 50. C’est une période ici marquée par la tristesse de la perte du frère et l’éclatement de famille. Sa mère dépressive, son grand frère qui a délaissé l’écriture plus noble et parti vivre à Hollywood pour écrire des films.
                                    
Un dénouement qui s’ouvre sur une prise en charge. Ça rassure… Mais en même temps, je m’étonne qu’encore une fois, le diagnostic de la leucémie s’infiltre … Je n’avais pas idée avant de commencer ce classique.