Vivre comme ménnonite, c’est une
curiosité en soi. Difficile de se mettre dans la peau d’individus qui ont
décidé que l’ère du temps, ce n’était pas pour eux. Mais puisque c’est une
culture imposée à la progéniture, il va s’en dire qu’il y a des risques que
cette dernière n’y adhère pas, voire qu’elle tente d’en sortir. Ne pas adhérer
aux valeurs familiales, aux valeurs du village qui est le ciment… faut être
fait fort, dirait-on. Si en plus, on n’a pas le gène du bonheur… Parce qu’on le
sait bien, le bonheur, c’est 50% inné, 10% les circonstances de la vie et le
40% restant… ça dépend du bon vouloir. S’imaginer avec le cœur déjà à moitié
vide de bonheur au départ et vivre dans un milieu où les contraintes
s’additionnent… oui le suicide existe,
là aussi.
Elf n’en est pas à sa première tentative
de suicide. Maintenant, elle veut se rendre en Suisse, là où le suicide assisté
est permis. Elle veut que Yoli l’emmène parce qu’elle ne veut pas mourir seule
ou, c’est plutôt Yoli qui ne veut pas
que Elf meurt seule. Quand Elf s’aperçoit qu’il est loin d’être certain que le
voyage se fera, elle décide d’en finir. En tant que lecteur, on fait ouf! On
n’aurait pas voulu que Yoli ait en plus ce boulet sur la conscience. Il me
semble qu’elle souffre suffisamment. Car… par amour, on sent qu’elle aurait
peut-être succombé à la requête de sa sœur.
Sa cousine s’est suicidée. La mère de sa
cousine, dont la force de caractère est tout autre, mourra aussi pendant l’hospitalisation
de Elf, mais du cœur. Encore et toujours le cœur qui est malade.
Comment dire… tant de souffrances. On se
dit que bien notre propre souffrance nous apparaisse parfois intolérable… notre
voisine, le client qu’on voit aujourd’hui, vit aussi une terrible souffrance!
Par chance… j’ai le gène du bonheur, je pars donc avec le verre à moitié plein!