dimanche 24 janvier 2016

"Les maisons" - Fanny Britt

Terminé hier, Les maisons de Fanny Britt est son premier roman si j’ai cru bien lire. Elle est dans le théâtre habituellement. Cette femme m’interpelle, car je la sens proche si elle ressemble à la protagoniste. J’ai entendu cette chronique qu’elle a lue sur le deuil à la radio et j’ai eu un véritable coup de cœur. Elle a réellement perdu son frère. Elle a le mot qui va dans des profondeurs mais qui sait remonter rapidement pour nous donner un peu d’air, voire nous faire sourire malgré la souffrance.
Les maisons que l’on quitte pour retrouver du bonheur ailleurs. Un nouveau toit, un nouveau décor, une nouvelle vie. La maison est témoin de ces joies, ces peines qui deviendront des souvenirs. Les murs seront la nostalgie de celui ou celle qui en a imprégné sa personnalité en changeant les fenêtres, coloré les volets, mais qui les quitte. Tessa est devenue agent d’immeubles lorsque le deuxième enfant est devenu assez grand. Elle aurait pu être chanteuse, mais elle ne semble pas avoir la personnalité suffisamment ostentatoire. Tessa est une bonne deuxième. En se promenant dans les périodes passées de sa vie, on comprend qu’elle était moins populaire que sa « best » Sophie; elle était suffisamment talentueuse pour être acceptée au conservatoire de musique, mais sans la fougue qui la ferait se démarquer comme chanteuse lyrique; puis il y a eu Francis cet amour de jeunesse nourri par un imaginaire débordant mais dont on verra bien qu’elle ne représentait pas plus qu’une parmi d’autres… puisqu’il ne se souvient même pas de son prénom…  
Tessa baigne dans une vie tranquille avec Jim musicien à l’orchestre symphonique, homme d’amour sans condition, trois enfants. Une vie d’apparence parfaite, mais elle se meurt par en-dedans. Il manque de l’étincelle pour faire sauter la bombe qu’elle traîne dans son sein. Quand par hasard Francis rejaillit dans sa vie par l’intermédiaire de cette maison qu’elle doit vendre, Tessa voit poindre la possibilité de faire tout sauter. Enfin elle voit son rêve de vie passionnée proche de se réaliser.
Mais l’imaginaire est beaucoup moins solide qu’une maison habitée du quotidien. On peut changer de maison à multiples reprises, mais le décor qui habite notre tête et notre cœur demeure aussi longtemps qu’on le désire. C’est à nous d’en décider les couleurs, et non pas à la société qui en impose les nuances.



J’ai adoré ce roman… Plume superbement maniée. Ça se lit avec facilité malgré le verbe recherché. 

mercredi 6 janvier 2016

"Ceux qui restent" - Marie Laberge

Premier roman de l’année. Cadeau de Noël de Jean-Pierre et William. Marie Laberge, une de mes auteurs québécoises préférées. 


« Les humains lumineux qui endossent la totalité de leur vie, sans exceptions » (p. 392).

Tous ceux qui restent sont ceux dont les liens étaient tissés autours de Sylvain qui se suicide à l’âge de 29 ans. Il est intéressant de voir se développer l’altruisme entre ces personnages qui ne se côtoyaient pas avant l’événement. Ces personnages ont chacun leur caractère, leur personnalité propre et rien n’aurait pu les rapprocher tellement ils sont différents. Toutefois, il y a le noyau, Sylvain, qui attire ses électrons. On décèle l’importance des liens, le besoin de l’autre pour rester en vie. Sans liens, c’est la mort… : Muguette, Demi-Lune (la mère de Mélanie), voire Sylvain le personnage noyau. Blanche, grand-mère de Sylvain et mère de Vincent Côté, le père, mourra aussi, mais de vieillesse, une mort naturelle qui vient au bon moment pour elle, elle qui cultivait l’altruisme. Ce sont justement ces personnages « lumineux qui endossent la totalité de leur vie » qui nous attirent dans ce roman. À travers les liens qui se créent entre ces personnages, on voit tomber les préjugés un à un, à mesure qu’on voit l’humanité surgir dans chacun. Plusieurs années sont nécessaires pour se reconstruire après un tel cataclysme que crée le suicide d’un proche. Mais il y a une reconstruction possible avec l’aide de son prochain. C’est un roman qui fait du bien, même si ça traite de la mort.

Passages aimées :
·         « S’il fallait échapper à tout ce qui enlaidit la vie, à tout ce qui l’altère, la rend souffrante et surtout nous rappelle sa finitude, est-ce qu’on serait encore des êtres humains? Ou des béats hébétés et gras ravis de goinfrer d’une violence télévisée qui en aucun cas, ne devrait nous effleurer? » (p. 289).
·         « On doit agir avec le présent et dans le présent. Mais il n’est pas interdit de tirer des leçons du passé et d’essayer de se comparer avec plus de sagesse, grâce aux coups durs reçus. Ça s’appelle l’expérience. » (p. 319).

·         « Qu’est-ce que la sexualité quand on n’a plus rien à se dire, à rêver, à être? Rien ou si peu. De la musique pour une scène vide » (p. 392).